Non, ce n’est pas le 1er avril… Cependant, cette actualité ne concerne pas la France, mais la Pologne. C’est le terme d’un véritable jeu de dupes, plutôt comique, où l’arroseur a fini par être arrosé. En effet, s’offusquant des primes versées aux ministres, des parlementaires de l’opposition ont obtenu gain de cause. Mais ils ont eux aussi été sévèrement atteints par la cure d’austérité que le gouvernement souhaite imposer à tous les élus…
Fini les primes gouvernementales !
En Pologne, la rémunération des ministres n’est pas très élevée par rapport à ce qu’il en est dans d’autres pays européens. Ce constat vaut même si le salaire mensuel moyen polonais est faible, aux alentours de 1 000 €. Par conséquent, il est d’usage que les membres du gouvernement s’accordent des primes, plus ou moins importantes en fonction des appétits. Le salaire de base des ministres n’a pas varié depuis 2004 (3 000 € environ), année de l’adhésion de la Pologne à l’Union européenne, tandis qu’en parallèle le revenu moyen des habitants a doublé. Le Premier ministre touche quant à lui un peu moins de 4 000 € avant impôts. Voici la présentation vidéo de la nomination de l’actuel leader polonais :
Récemment, l’opinion publique polonaise a été choquée par les primes que se sont versées les ministres du pays, alors qu’eux-mêmes avaient fait mine de s’offusquer de cette pratique lorsqu’ils étaient dans l’opposition quelques années auparavant. On parle d’un montant global de 15 à 19 000 € pour 2017, une somme assez mal justifiée par Beata Szydło, femme politique du PiS qui occupait jadis les fonctions de Premier ministre. Son successeur Mateusz Morawiecki, à la carrière professionnelle brillante et aux actifs solides, est parti en sens opposé. Il a demandé aux membres du gouvernement de reverser ces primes à des organes caritatifs.
Mais ça ne s’arrête pas là…
Le président du PiS, le parti au pouvoir, est Jarosław Kaczyński. Celui-ci n’exerce plus des fonctions au sommet de l’État, mais il chapeaute la coalition conservatrice tout en étant député. Il jouit en Pologne d’une excellente réputation du côté de l’honnêteté et de la probité : les Polonais le savent peu attaché à l’argent. Du coup, cet ancien Premier ministre a profité de l’occasion pour infliger un véritable pied de nez aux parlementaires de l’opposition qui ont su instrumentaliser l’affaire des primes. Et ces derniers ne s’attendaient probablement pas à une telle issue…
Pour mémoire, Jarosław est le frère du président polonais mort dans des circonstances étranges il y a une dizaine d’années :
Kaczyński a assumé le caractère populiste de sa proposition. Il a même plaisanté en latin : « Vox populi, vox Dei » (ce que peuple veut, Dieu le veut – pour singer un adage célèbre en France) ! Il s’agit non seulement d’entériner la suppression définitive des primes ministérielles, mais de réduire de 20 % la rémunération de tous les sénateurs et députés polonais. Ces parlementaires verraient ainsi leur salaire passer de près de 2 400 € par mois (10 021 zlotys, la monnaie nationale) à 1 930 € (8 017 zlotys). L’écart entre cette rémunération et le salaire moyen en Pologne serait inférieur au double. Les dirigeants d’entreprises publiques devraient eux aussi être touchés par l’austérité, dans un contexte de pré-campagne électorale assez tendu.